QU’EST-CE QU’UNE STARTUP ESS ?
Site de troc, échange de talents, création d’une monnaie solidaire… Chaque année, en France, des dizaines de start-up spécialisées dans l’économie sociale et solidaire (ESS) voient le jour. Quels sont les critères qui définissent ce nouveau modèle économique ? Comment créer sa start-up ESS ? Quels sont les avantages de ce nouveau modèle ? Tour d’horizon des règles qui encadrent l’économie sociale et solidaire.
Depuis 2015, l’économie sociale et solidaire ne représente pas moins de 12% des emplois privés et 10% du PIB. Longtemps resté dépourvu de véritable définition juridique[1], ce secteur en pleine expansion s’est ainsi récemment imposé au cœur des préoccupations législatives. La loi du 31 juillet 2014[2] est venue définir la notion d’ « économie sociale et solidaire » et fixer son périmètre juridique.
[1] BLIN-FRANCHHOMME M-P., L’entreprise de l’économie sociale et solidaire : un nouveau « sujet de droit naissant », Revue Lamy Droit des affaires 2013, n°88 supplément
[2] L. n°2014-856, 31 juill. 2014 relative à l’économie sociale et solidaire
I – LES PRINCIPES FONDAMENTAUX DE L’ÉCONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE
A – Qu’est-ce que l’Economie sociale et solidaire ?
Dans son article premier, la loi du 31 juillet 2014 définit l’économie sociale et solidaire comme « un mode d’entreprendre et de développement économique adapté à tous les domaines de l’activité humaine auquel adhèrent des personnes morales de droit privé ». Les domaines d’activité doivent néanmoins remplir plusieurs conditions cumulatives.
Comme son nom l’indique, une entreprise sociale et solidaire doit avoir un autre but que celui du « seul partage des bénéfices[3] ». Ce nouveau modèle décrit ainsi des entités morales qui mettent leur inventivité et leur créativité au service de problématiques socio-économiques et/ou environnementales.
En outre, il faut que ces entités morales établissent une gouvernance démocratique. Autrement dit, la circulation de l’information et la participation des salariés doivent se révéler véritablement efficaces au sein de l’entreprise. Dans le texte, cette gouvernance « définie et organisée par les statuts, prévoie l’information et la participation, dont l’expression n’est pas seulement liée à leur apport en capital ou au montant de leur contribution financière, des associés, des salariés et des parties prenantes aux réalisations de l’entreprise[4] ».
Enfin, des préceptes relatifs à la gestion même de l’entreprise s’inscrivent naturellement et désormais juridiquement dans la définition d’une économie sociale et solidaire. Les personnes morales doivent notamment présenter une lucrativité limitée dans la mesure où leurs bénéfices doivent être « majoritairement consacrés à l’objectif de maintien ou de développement de l’activité de l’entreprise[5] ».
B – Qui sont les acteurs de ce nouveau modèle économique ?
La plupart des entreprises ESS sont des coopératives d’entrepreneurs (de la petite SCOP à la grande banque), des associations, des fondations ou encore des mutuelles (de santé, de prévoyance ou de retraite)[6].
À leurs côtés, on trouve également les entreprises solidaires, prenant souvent le visage d’une startup ESS. Il s’agit de sociétés qui n’appartiennent pas à l’économie sociale entendue au sens strict dans la mesure où elles exercent une activité commerciale et concurrentielle classique, mais elles présentent indéniablement une dimension sociale au travers de leurs finalités. Sont ici visées les entreprises adaptées (AE) et les services d’aide par le travail (ESAT) qui ont pour mission d’intégrer durablement les travailleurs handicapés dans l’emploi.
Sont également concernées les structures d’insertion par l’activité économique (SIAE). Enfin, le dernier volet de ce secteur est constitué des sociétés commerciales qui respectent les principes de l’économie sociale et solidaire précédemment évoqués dans leurs statuts.
Toutes ces entités peuvent se faire agréer « entreprise solidaire d’utilité sociale » (ESUS). Pour certaines d’entre elles, aucune démarche n’est nécessaire dans la mesure où elles en bénéficient de plein droit[7]. C’est le cas notamment des associations intermédiaires (article 5132-7 Code du travail), des organismes d’insertion sociale, des services d’aide à l’enfance, des entreprises adaptées (entreprise employant majoritairement des travailleurs handicapés) etc. D’autres entreprises, en revanche, nécessitent l’obtention d’un agrément.
II – L’OBTENTION DE L’AGRÉMENT ESUS (anciennement agrément ESS)
A – Les conditions de l’agrément ESUS
L’agrément ESUS permet d’identifier les entreprises à forte utilité sociale, répondant à des besoins sociaux.
Les entreprises et organismes de l’économie sociale et solidaire (ESS) sont donc éligibles à l’agrément « entreprises solidaire d’utilité sociale » (ESUS), si elles remplissent un certain nombre de conditions réunies aux termes de l’article L.3332-17-1 du Code du travail[8].
En premier lieu, l’entreprise doit avoir pour objectif principal la recherche d’une utilité sociale ; cet objectif devant clairement figurer dans les statuts de l’entreprise[9].
Ainsi, au regard de la loi, peuvent être agréées les entreprises qui satisfont à l’une au moins des conditions suivantes : elles ont pour objectif d’apporter à travers leur activité un soutien à des personnes en situation de fragilité, elles tendent à contribuer à la lutte des exclusions et des inégalités et au développement du lien social et de la cohésion territoriale ou enfin, elles concourent au développement durable, à la transition énergétique ou à la solidarité internationale.
En second lieu, la charge induite par l’objectif d’utilité sociale doit impacter le compte de résultat de manière significative, au regard du décret d’application du 23 juin 2015[10].
De plus, l’obtention de l’agrément suppose que l’entreprise demanderesse respecte certaines modalités et limites dans sa politique de rémunération des salariés ou dirigeants[11]. D’une part, la moyenne des sommes versées, y compris les primes, aux cinq salariés ou dirigeants les mieux rémunérés ne doit pas excéder un plafond annuel fixé à 123 196 euros, correspondant à sept fois le Smic. D’autre part, les sommes versées, y compris les primes au salarié ou dirigeant le mieux rémunéré, ne doivent pas excéder un « plafond annuel fixé à 175 994 euros, correspondant à dix fois le Smic »[12].
Enfin, aucun agrément ne peut être délivré à l’entreprise si ses titres de capital sont négociés sur un marché réglementé.
B – La procédure d’obtention de l’agrément
D’un point de vue procédural, la demande d’agrément se fait auprès de la DIRECCTE du département où l’entreprise a son siège social, par lettre recommandée avec accusé de réception[13]. Dans l’hypothèse où « l’entreprise a son siège social dans un autre pays de l’Union européenne, elle doit envoyer sa demande au préfet du département de son principal établissement en France[14] ».
L’agrément est délivré pour une durée de cinq ans, ou de deux ans lorsque l’entreprise demanderesse a été créée depuis moins de 3 ans à la date de la demande d’agrément.
III – LES AVANTAGES CONFÉRÉS PAR L’AGRÉMENT ESUS
A – Les aides structurelles générales
En premier lieu, les entreprises agréées sont aidées d’un point de vue institutionnel dans le cadre des stratégies régionales de l’ESS. Leur développement est assuré par les Chambres régionales de l’ESS (CRESS). Aussi, elles entrent en synergie avec les pôles territoriaux de coopération économique (PTCE) mettant en œuvre des « stratégies de mutualisation, de coopération ou de partenariat » au service de projets innovants portés par ce type d’entreprises[15].
B – Les avantages financiers
Bien que l’agrément en lui-même soit insuffisant à l’entreprise pour accéder directement aux financements, il lui permet toutefois d’être éligible à certains dispositifs financiers spécifiquement destinés à l’économie sociale et solidaire.
Par exemple, les entreprises agréées peuvent prétendre à des prêts participatifs sociaux et solidaires de la Bpi France, tels que les « Prêts Economie Sociale et Solidaire » (ou PESS). Cela leur permet également d’accéder à certains fonds d’innovation sociale, toujours auprès de la Bpifrance. De même, les entreprises titulaires de l’agrément ESUS peuvent bénéficier du Dispositif Local d’Accompagnement (DLA) qui permet aux structures reconnues d’utilité sociale de bénéficier d’accompagnements dans leurs démarches de création ou de consolidation de l’emploi.
C – Les avantages fiscaux
L’agrément ESUS présente enfin plusieurs avantages fiscaux[16].
D’abord, il permet l’accès au fond d’épargne salariale solidaire permettant aux entreprises accordant à leurs salariés le bénéfice d’une épargne salariale de réduire fortement leurs charges sociales sur ces montants.
Enfin, l’agrément ESUS permet une réduction de l’ISF et de l’IR, au titre des dispositifs de soutien fiscal ISF-PME et Madelin, en faveur des contribuables personnes physiques investissant dans des entreprises bénéficiant de l’agrément.
N’hésitez pas à venir nous rencontrer pour en parler. Vous trouverez un savoir-faire au service de l’esprit d’entreprendre auprès de notre cabinet qui sert les sociétés innovantes.
Maître Céline Bondard
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